Définition et objectif de l’ordonnance de protection
L’ordonnance de protection, prévue aux articles 515-9 à 515-13 du Code civil, constitue une réponse rapide et efficace pour protéger les victimes de violences conjugales ou intrafamiliales. Prononcée par le juge aux affaires familiales, elle vise à assurer la sécurité immédiate des victimes, indépendamment de toute procédure pénale.
Conditions de délivrance et preuve
L’ordonnance de protection peut être délivrée lorsqu’il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables l’existence de violences exercées au sein du couple (marié, pacsé ou concubin) ou après la séparation, y compris lorsqu’elles sont subies par un ou plusieurs enfants.
Contrairement à une action pénale, la preuve ne repose pas sur la certitude des faits, mais sur leur vraisemblance. Le juge apprécie la situation in concreto, à partir d’éléments matériels et de témoignages (plaintes, mains courantes, attestations de témoins, certificats médicaux…etc.).
Procédure de demande et déroulement de l’audience
La demande est formée par la victime (ou exceptionnellement par le ministère public) par requête auprès du Juge aux Affaires Familiales. Elle peut être accompagnée ou non d’une demande de divorce ou de séparation.
L’audience doit se tenir dans les six jours suivant la fixation de la date d’audience par le greffe.
La procédure est orale et contradictoire.
L’audience se tient en chambre du conseil (huis clos).
Les parties peuvent être assistées d’un avocat. Nous vous conseillons de prendre attache avec un avocat qui pourra vous conseiller sur l’opportunité d’une telle procédure et monter le dossier pour maximiser les chances de succès.
Rôle du Procureur de la République et mesures possibles
En amont de l’audience, le Procureur de la République doit transmettre au Juge aux Affaires Familiales un avis favorable ou défavorable s’agissant de l’ordonnance de protection sollicitée.
Le Juge aux Affaires Familiales n’est pas lié par cet avis et peu tout à fait s’en affranchir.
Dans le cas où il est fait droit à la délivrance d’une ordonnance de protection, il peut être prévu :
- L’interdiction pour l’auteur présumé des violences d’entrer en contact avec la victime et/ ou l’enfant ou de paraître à proximité du domicile ou du lieu de travail.
- L’attribution du logement à la victime pour une durée prévue, même s’il est en indivision ou propriété exclusive de l’auteur des violences.
- L’organisation des modalités d’exercice de l’autorité parentale et du droit de visite (résidence de l’enfant, droit de visite et d’hébergement voire droit de visite médiatisé, contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant).
- L’autorisation pour la victime de dissimuler son domicile.
- Une prise en charge médico-psychologique du mis en cause.
Durée, renouvellement des mesures et exécution de l’ordonnance
Les mesures prononcées ont une durée maximum de 12 mois. Elles peuvent être prolongées au-delà si le juge est saisi pendant leur durée d’application d’une requête en divorce, en séparation de corps ou d’une demande relative à l’exercice de l’autorité parentale. Le renouvellement des mesures est alors automatique.
L’ordonnance est exécutoire de plein droit à titre provisoire, et ce, nonobstant tout recours. Cela signifie qu’en dépit du fait que la partie adverse interjette appel de cette ordonnance dans un délai de 15 jours à compter de sa notification par Commissaire de justice, cette décision demeure applicable.
L’ordonnance de protection peut être renouvelée si le Juge aux Affaires Familiales est saisi du fond du dossier (modalités relatives à l’exercice de l’autorité parentale ou divorce).
Exemple de cas pratique
Très récemment, nous avons obtenu la délivrance d’une ordonnance de protection à l’égard d’un ex-concubin de notre cliente.
Un enfant était né de cette relation.
Le contexte était le suivant : le père de l’enfant avait multiplié les tentatives de suicides et les actes de violences récentes à l’égard de la mère de l’enfant et de son entourage, laquelle avait été contrainte de déposer diverses plaintes.
Notre cliente révélait ainsi l’existence de violences anciennes pendant la vie commune.
Un certificat médical établi par un médecin légiste étayait les traumatismes subis par notre cliente.
Divers échanges de sms particulièrement violents étaient également communiqués au Juge afin de démontrer la vraisemblance des violences et l’actualité du danger